[tabby title= »Présentation »]
« Par le jour qui approche, osons un tel coup d’audace, essayons de prendre en mains les affaires de l’Etat pour pouvoir faire ainsi à l’Etat quelque bien. »
Aristophane, L’assemblée des femmes.
UNIVERSITÉ D’ÉTÉ 2014
« Femmes debout : elles pensent, elles bougent, elles créent et se moquent des idées reçues ! »
organisée avec le soutien de la Région Poitou-Charentes
Fidèle à La Rochelle et à la Région Poitou-Charentes qui l’accueillent une nouvelle fois, l’Université d’été de l’Assemblée des femmes – 2014 se tiendra les 27 et 28 août prochains, salle de l’Oratoire à La Rochelle, sur le thème résolument positif de la victoire des femmes sur les préjugés, les stéréotypes, les clichés sexistes, les violences et autres freins trop connus de leur épanouissement.
Ce moment de formation et d’échanges est ouvert, dans la tradition et les valeurs de nos Universités d’été, à toutes les femmes et tous les hommes de progrès, élu-e-s et non-élu-e-s.
Notre objectif ?
Mesurer ensemble où en sont les femmes qui ont pris en main leur avenir dans le quotidien de leur vie, qui assurent leur « autonomisation » (les anglais disent « empowerment »). Prendre la mesure du chemin parcouru. Déterminer les facteurs qui permettent cette victoire des femmes.
Nous avons choisi pour faire ce point, des domaines dans lesquels les risques sont, pour elles, majeurs : la culture, les médias et le sport.
Deux chercheurs, l’une neurobiologiste, l’autre philosophe, poseront en ouverture le cadre de notre réflexion et de nos débats.
Des chercheur-e-s, des artistes, des artisanes, des sportives, des représentant-e-s des partis politiques, engagé-e-s pour l’égalité des femmes et des hommes apporteront leur contribution à nos échanges.
Nous accueillerons la Ministre des droits des femmes en clôture de cette université.
Tables rondes, librairie féministe, repas pris en commun: nous vous attendons pour ces deux journées de réflexion et d’échanges amicaux.
En partenariat avec :
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programme définitif
FEMMES DEBOUT :
ELLES PENSENT, ELLES BOUGENT, ELLES CRÉENT ET SE MOQUENT DES IDÉES REÇUES !
Le texte des interventions figure sur cette page, sous l’onglet « intervenants ».
Mercredi 27 août 2014
9h ACCUEIL DES PARTICIPANT-E-S Danielle BOUSQUET
9h30 OUVERTURE DE L’UNIVERSITÉ D’ÉTÉ 2014
- – Jean-François FOUNTAINE, Maire de La Rochelle
- – Jean-François MACAIRE, Président de la Région Poitou-Charentes
10h10 Intervention Yvette ROUDY, Présidente d’honneur de l’AdF, ancienne Ministre des droits des femmes de François Mitterrand
10h30 SÉANCE INTRODUCTIVE : PRÉSENTATION DES TRAVAUX
- – Danielle BOUSQUET, Présidente de l’ADF
- – Lady N’GO MANG, Journaliste de télévision
- – Geneviève COURAUD, Présidente d’ECVF
11h45 « OLYMPE DE GOUGES AUJOURD’HUI », Françoise DURAND , Vice-présidente de l’ADF
12h30 – 14h déjeuner sur place
14h-16h30 CERVEAU, SEXE et PREJUGÉS
- Présentation : Nicole KIIL-NIELSEN, ancienne députée européenne EELV
- – Catherine VIDAL, neurobiologiste, directrice de recherche à l’Institut Pasteur
- – Jean-Michel BESNIER, professeur de philosophe à Paris-Sorbonne –Paris IV
- Echanges avec la salle
17h- 18h30 Projection du film « Pourquoi les femmes sont-elles plus petites que les hommes ? »
- de Véronique KLEINER, et débat en présence de la réalisatrice.
- Présentation et Animation : Michèle LOUP, Vice-présidente d’ECVF, Présidente de « Du côté des femmes »
Jeudi 28 août 2014
9h30 OUVERTURE Francine BAVAY, Conseillère régionale d’Ile-de-France, Présidente d’honneur d’ECVF
– Catherine BONNET, pédopsychiâtre
9h40 ARTISTES ET ARTISANES DEBOUT
- Animation : Nathalie LANZI, Conseillère régionale de Poitou-Charentes en charge des droits des femmes
- – Geneviève SELLIER, historienne du cinéma, professeure des universités, spécialiste des représentations des rapports sociaux de sexe au cinéma et à la télévision
- – Eva DARLAN, comédienne
- – Ilham BAKAL, comédienne, metteuse en scène
- – Marie-Noëlle BAS, présidente des Chiennes de garde, « Image des femmes dans les médias et la publicité »
- Echanges avec la salle
11h30 Projection du film « La flamme d’une soudeuse » (31’) avec Marine BRÉGEON, film de Michel CARRIERE, en présence du réalisateur
12h30 – 14h déjeuner sur place
14h – 16h30 SPORTIVES DEBOUT
- Animation : Claire DONZEL, professeure agrégée d’éducation physique et sportive, conseillère régionale P.S. Rhône-Alpes
- – Catherine LOUVEAU, professeure de sociologie du sport à l’Université Paris-Sud
- – Marie- Françoise POTEREAU, présidente de Fémix Sports
- – Sarah STEYAERT, championne du monde de Laser radial
- Echanges avec la salle
16h30 -17h30 En présence de :
- – Marisol Touraine, Ministre des Affaires sociales de la santé et des Droits des femmes
- – George Pau-Langevin, Ministre des Outre-mer
- – Pascale Boistard, Secrétaire d’Etat aux droits des femmes
- Accueil Françoise MESNARD, Vice-présidente de la région Poitou-Charentes, Maire de Saint Jean d’Angely
18h CLÔTURE Danielle Bousquet
En partenariat avec :
[tabby title= »Intervenant-es »]
INTERVENTION DE DANIELLE BOUSQUET
Présidente de l’ADF
UNIVERSITÉ D’ÉTÉ DE L’ASSEMBLÉE DES FEMMES
27- 28 août 2014
DISCOURS D’OUVERTURE
Cher-e-s Ami-e-s,
Nous avons voulu à l’Assemblée des femmes, en accord avec l’association ECVF, être fidèles à La Rochelle et à la Région Poitou-Charentes que nous retrouvons avec plaisir, comme chaque année.
Et je voudrais remercier le Maire de La Rochelle, Jean-François Fountaine, qui, comme son prédécesseur, Maxime Bono, met gracieusement à notre disposition cette si belle salle de l’Oratoire, remercier aussi Jean-François Macaire, Président de la Région Poitou-Charentes, qui lui aussi, comme la Présidente Ségolène Royal le faisait avant lui, nous a accordé une subvention pour l’organisation de cette Université d’été.
Merci à tous deux, et je vais vous donner la parole dans un instant.
Notre objectif en préparant cette Université d’été, était de montrer combien, en dépit des préjugés, des idées reçues, et des stéréotypes sexistes, les femmes sont capables de se mettre en marche et de surmonter ces clichés et autres violences qui souvent entravent leur épanouissement personnel, leur liberté et leur autonomie.
Nous nous voulions résolument positives et apporter notre pierre au moment où, à la prochaine rentrée scolaire, doit être généralisé, dans l’Education Nationale, le travail en direction des enseignant-e-s et des élèves pour « s’attaquer aux inégalités d’habitude dès le plus jeune âge », c’est-à-dire permettre à chaque enfant de prendre conscience de ses capacités et d’avoir la liberté de les exercer.
C’était là l’engagement conjoint de la Ministre des droits des femmes et du Ministre de l’Education Nationale en juin dernier.
Mais nous ignorions les bouleversements politiques d’aujourd’hui, et la disparition du Ministère des droits des femmes ; et cela bouleversera sans doute la manière dont nous conclurons ces journées.
Il est un peu tôt pour le dire, mais la disparition du Ministère, mettant les droits des femmes avec les affaires sociales.
Il y a une chose cependant que nous voulons réaffirmer : c’est notre volonté de voir les féministes se faire entendre clairement pour que les droits des femmes, les libertés des femmes soient – restent ? – un enjeu fondamental au cœur de tout projet de société qui de veut progressiste. Et à cet égard, le fait que le Conseil Constitutionnel ait rejeté le recours que les Sénateurs de droite avaient déposé contre le texte de loi sur l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, c’est une bonne nouvelle !
Vous le savez, cette loi promulguée début août apporte des avancées à la fois en matière de droits et de lutte contre les violences par la généralisation du téléphone de grand danger tout en visant aussi la lutte contre un certain nombre de préjugés sexistes comme la réforme du congé parental qui, par exemple, réserve une période à l’autre parent.
INTERVENTION d’YVETTE ROUDY
Présidente d’honneur de l’Assemblée des Femmes
« Le retour des vieux démons«
Les droits des femmes sont un combat. Un combat politique directement lié à la démocratie. Gandhi considérait que le degré de démocratie d’un Etat se mesure au degré d’avancement des droits des femmes. Il avait raison.
Est-ce à dire que notre gouvernement connaîtrait un recul de démocratie, puisqu’il vient de rayer d’un trait de plume notre Ministère des droits des femmes, le dissolvant dans les Affaires Sociales et la Santé ? Je le crains. En tout cas, c’est une régression.
L’embellie aura donc duré 27 mois que les féministes ont passé sur un petit nuage avec un Ministère des Droits des Femmes de plein exercice, transversal, tenu par une jeune femme de qualité qui vient de recevoir une promotion bien méritée
Il y a trois ans, lors de notre Université d’été de l’Assemblée des Femmes, nous décidions d’adresser une lettre aux candidats à la Présidence : François Hollande, Arnaud Montebourg, Ségolène Royal, Manuel Valls. L’un d’entre eux est aujourd’hui Président de la République, un autre est Premier Ministre, une autre une Ministre importante, et le dernier vient de quitter le Gouvernement.
Que demandions-nous dans ce courrier? Avant toute chose, un Ministère des Droits des femmes de plein exercice, transversal, capable de réaliser trois objectifs :
– La PARITE Politique dans les 5 ans et la suppression totale des indemnités aux Partis ne réalisant pas cet objectif. Là-dessus nous progressons, lentement, j’y reviendrai.
– En matière d’Egalité Professionnelle, nous demandions l’application des lois existantes, le respect du rapport annuel, une formation spécifique des personnels chargés de l’application de la loi, en particulier des Inspecteurs du Travail, et des sanctions pour les entreprises n’appliquant pas la loi. Nous ajoutions l’étude particulière des situations désastreuses créées par le Travail à Temps Partiel.
– Le troisième objectif : le respect du corps des femmes. En matière d’IVG, de contraception, nous demandions que ce droit soit inscrit dans la Constitution. Nous insistions sur toute marchandisation du corps des femmes, à commencer par la prostitution, et recommandions le modèle suédois qui pénalise le client. Enfin nous indiquions que nous nous prononcions contre toute location de ventres, pudiquement appelée GPA, Gestation Pour Autrui. Des mots qui ne sont pas neutres.
Alors depuis Mai 2012, où en sommes-nous ?
Pour ce qui est du Ministère, nous avons la réponse. Ce symbole fort aura duré 27 mois. Cette suppression est une régression, répétons-le.
Côté PARITE nous progressons… très lentement. L’histoire nous a appris qu’en matière de droits les femmes, nous avançons de deux pas pour reculer d’un. Nous avons affaire à forte partie et à une concurrence bien organisée : une place pour une femme est toujours considérée comme une place en moins pour un homme. La loi n’est pas assez sévère. Et il existe des connivences fortes, voire des alliances, contre les femmes. Déjà quelques places réservées « femmes » ont été détournées. Préparons-nous à une nouvelle offensive. Là aussi, le recul est possible.
Il ne vous a sûrement pas échappé que cette année nous fêtions le 70° anniversaire du droit de vote des femmes, un droit octroyé par un Général, par ordonnance, mais voté par le Conseil National de la Résistance. Connaissant la misogynie particulière de ce pays et la résistance farouche des hommes qui dirigent les Partis, De Gaulle a eu raison de procéder par ordonnance.
Serions-nous un pays particulièrement misogyne ? Le fait est que peu de pays ont eu une loi salique et des « Révolutionnaires » hommes qui ont su faire voter une loi excluant les femmes du champ politique (cf. le fameux rapport Amar). Fort heureusement, il s’est trouvé une femme pour s’élever contre cette mise à l’écart, Olympe de Gouges, que nous voulions faire entrer au Panthéon. Nous avons essuyé là un échec. C’est pourquoi Françoise Durand va vous présenter un projet qui demande qu’Olympe de Gouges entre symboliquement à l’Assemblée Nationale. Projet que je soutiens. Nous connaissons toutes sa phrase célèbre : « les femmes ont le droit de monter à l’échafaud, elles doivent avoir le droit de monter à la Tribune. »
La PARITE POLITIQUE reste l’indicateur le plus sûr de la démocratie en matière de droits des femmes
Il y a plus de 20 ans – eh oui, 20 ans déjà! – l’Europe lançait un appel – l’appel d’Athènes – incitant les Etats membres à appliquer la Parité. C’est à partir de cet appel que nous avons fondé l’Assemblée des femmes et œuvré sous diverses formes. Nous n’étions pas seules : de nombreuses associations, des ouvrages multiples, des pétitions, naissaient partout en Europe. Si les femmes se sont mobilisées, les hommes restaient sourds à cet appel. C’est pourquoi j’eus l’idée de créer un événement sans précédent en demandant à Simone Veil de participer à un APPEL. Ce fut le manifeste des DIX – dix femmes : cinq de droite et cinq de Gauche, anciennes ministres. Manifeste dont Lionel Jospin s’est largement inspiré pour faire voter la première loi sur la Parité. C’était il y a 18 ans. A ce moment-là nous comptions 5% de femmes sénatrices et 6% de députées à l’Assemblée Nationale.
A ce propos j’ai le plaisir de vous apprendre que le Manifeste des DIX vient d’entrer dans l’histoire par la grande porte, puisqu’il a été sélectionné pour faire partie des textes proposés au Bac cette année.
Nous progressons…
Encore une date à propos de la parité : 2007. En 2007, les socialistes ont marqué un tournant. A la demande de François Hollande, nous avons pu participer, Geneviève Couraud et moi, aux travaux préparatoires des listes électorales. Ce qui a permis – l’effet présidentiel aidant – de parvenir dans le Groupe majoritaire de l’Assemblée Nationale à un pourcentage proche de 35%, même si l’Assemblée Nationale dans son ensemble n’a pas encore atteint les 30%, chiffre magique, dit – masse critique…
Nous progressons… Et nous avons encore un Gouvernement Paritaire, même si, en matière de progrès – nous venons de le constater – rien n’est jamais définitivement acquis.
Au Parlement Européen, la France s’en tire plutôt bien avec 43,2% de femmes, même si je n’en connais aucune de féministe. Mais cela est une autre histoire.
Progrès encore paritaire. La Réforme des modes de scrutins locaux du 17 Mai 2013, défendue par notre ex-Ministre Najat Vallaud-Belkacem impose la Parité aux communes de plus de 1000 habitants. Nous comptons donc aujourd’hui 16.OOO conseillères municipales de plus. Ce qui fait 40,3% contre 13,8% en 2008.
Nous progressons…
Ces élues nouvelles vont accéder à des responsabilités, se former, prendre goût à la politique. Et même si toutes ne sont pas féministes, certaines le sont.
Je ne résiste pas au plaisir de partager avec vous la satisfaction qui a été la mienne lorsque j’ai découvert, dans la presse locale pendant les vacances, l’action d’une femme, adjointe au Maire de Bayonne. Il s’agit de Martine Bisauta qui a fait retirer une annonce sexiste suite à une plainte qu’elle a déposée auprès de l’autorité de régulation professionnelle. L’entreprise incriminée – l’entreprise Dekra de Tarnos – vantait la qualité de son contrôle technique automobile en montrant une femme nue, sans tête, qui disait « rien ne nous échappe. »
Nous progressons. Il semble bien qu’une relève soit là.
Et on me dit (source notre ex-ministère) que nous aurions l’espoir de compter en 2015 50% de conseillères générales, sachant que les Partis qui ne respectent pas la Parité vont voir leur pénalités doublées (grâce à un amendement de Bruno Le Roux. Il existe des hommes féministes, sans quoi nous n’en serions pas là !). Sachant aussi que la Parité sera étendue aux responsabilités sociales et professionnelles
En matière d’EGALITE PROFESSIONNELLE, nous progressons aussi.
4.000 entreprises ont déposé ce que j’appelais « des plans d’Egalité ».
545 ont reçu une mise en demeure de le faire.
Et 5 entreprises ont été sanctionnées.
Enfin – et c’est important – l’accès aux commandes publiques – ce qui représente 75,5 milliards d’Euros par an – sera désormais soumise au respect de l’Egalité Professionnelle.
Par ailleurs et afin de briser le plafond de verre, 202 femmes ont été nommées aux emplois supérieurs de l’Etat, soit 32% contre 27% en 2012. (source notre ex-ministère
J’ajoute que des aides à hauteur de 47 millions d’euros sont prévues pour soutenir spécifiquement l’entreprenariat féminin.
J’ai également appris qu’il a été prévu une amélioration pour les femmes bloquées dans des emplois à temps partiel, ainsi que des retraites partielles. Ces femmes sont les oubliées de l’Egalité Professionnelle. Elles sont souvent seules, s’expriment peu, n’ont pas de syndicats. Elles représentent les nouvelles poches de pauvreté.
Dernier point : le CORPS des femmes.
Nous devons au nouveau gouvernement la couverture à 100% de la contraception des mineures.
Une campagne est prévue – me dit-on – en matière de santé des femmes avec pour objectif de réduire de 30% le nombre des décès par cancer de l’utérus.
Il semble – selon la presse – que l’IVG reparte à la hausse. Après dix années de stabilité, les premiers chiffres de 2013 montrent une augmentation de près de 5% du nombre des IVG. Conséquence sans doute du scandale des pilules de 3° et 4°générations.
En matière de violences faites aux femmes – sorte de fléau mondial (vous savez que tous les deux jours et demi, une femme meurt sous les coups de son compagnon, dans le monde) les moyens accordés par l’Etat ont été doublés et portés à 66 millions d’Euros et 350 intervenants sociaux en commissariat et en brigade sont prévus d’ici 2017, soit le doublement des effectifs
A ce propos, il ne vous a pas échappé que cette année a marqué le 11° anniversaire de l’assassinat de Marie Trintignant. Des associations veillent à ce que chaque année sa tombe soit fleurie au Père Lachaise, sachant que pendant ce temps son meurtrier, (dont l’épouse s’est par ailleurs suicidée), s’en est tiré avec 4 ans de prison (ce qui n’est pas cher pour un meurtre ), se porte fort bien et entame une seconde carrière soutenu vigoureusement par tout un courant et une presse machiste qui s’exprime ouvertement.
Dans ce domaine je ne sais pas si nous progressons. J’ai plutôt l’impression que nous régressons et que le machisme est de plus en plus virulent.
S’agissant de la marchandisation du corps, nous savons que le marché financier de la prostitution est florissant – les proxénètes sont de remarquables hommes d’affaires et ils ont de puissants soutiens. Nous avons à ce sujet essuyé une défaite au Sénat où nos sénateurs ont fait disparaître de notre texte la condamnation du client. Il faudra le représenter tant que nous sommes là. C’est une affaire à suivre car nous savons qu’il se peut que l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale ne le permette pas. (sans commentaires)
S’agissant des mères porteuses (ou Gestation Pour Autrui), un fait divers récent a rappelé que nous avons raison de nous y opposer. Récemment un couple Australien, qui avait « loué » en Indonésie le ventre d’une femme très pauvre, aurait refusé l’enfant au motif qu’il était trisomique.
Bien sûr, vous n’ignorez pas qu’un grand texte, proposé par notre ex-Ministre, Najat Vallaud-Belkacem, regroupe l’ensemble des lois qui concernent les femmes. Une loi-cadre en quelque sorte. C’est excellent.
Je voudrais dire aussi que, lors des célébrations, cette année, du centenaire de la guerre 14/18, je n’ai rien entendu dire sur l’action des femmes pendant toute cette période. Or, ce sont elles qui ont fait marcher le pays. Sur cette question je ne peux que vous recommander l’excellent ouvrage de Françoise Thébaud « Les femmes au temps de la guerre de 14/18 », préfacé par Michelle Perrot.
Je m’aperçois que je n’ai pas dit un mot de ce qui se passe dans le monde. Grâce à Internet, nous ne pouvons ignorer les atrocités qui se passent du côté des femmes du Sud, de l’Est, d’Asie, d’Afrique et surtout de l’Islam radical. Femmes persécutées, excisées, battues, vendues, échangées comme des marchandises, égorgées, éventrées. Femmes sans droits. Beaucoup d’entre nous sont engagées dans ce domaine. Nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas.
Djemila Benhabid, que nous avons invitée une année, a écrit là-dessus d’excellentes choses. Guy Sorman, écrivain français, vient de publier une chronique dans le « Monde » où il souligne que « Les femmes sont la cible principale de l’Islam radical ». Il dénonce cette haine particulière des femmes que rien n’indique dans le Coran. Des musulmans religieux commencent aussi cette dénonciation : le recteur de la Mosquée de Lyon, ainsi que le Grand Mufti d’Arabie Saoudite qui rappelle que les idées extrémistes radicales n’ont rien à voir avec l’Islam.
POUR CONCLURE je dirais qu’il est indispensable que les associations féminines et féministes soient plus que jamais vigilantes et UNIES. Elles doivent se développer, agir, s’unir, affirmer leur présence, soutenir les gouvernements qui vont dans la bonne direction, et se manifester si ce n’est pas le cas.
Sans doute entre nous, avons-nous des sensibilités politiques diverses. Tout comme la politique a ses courants. Mais le féminisme peut être « transcourants » et parfois traverser la droite comme la gauche (souvenons-nous du Manifeste des DIX). Nous pouvons faire des alliances ponctuelles sur des points précis. Il n’est pas nécessaire d’être d’accord sur tout.
L’important c’est d’agir. Une relève est prête, qui doit savoir que rien, jamais, n’est définitivement acquis.
DANIELLE BOUSQUET
PRÉSENTATION DE L’UNIVERSITÉ D’ÉTÉ-2014
Lorsque le titre de cette Université d’été s’est imposé à nous, c’est parce que nous sortions d’une période un peu chahutée politiquement sur les ABCD de l’Egalité.
Ces ABCD de l’Egalité qui avaient comme objectif, ainsi que l’indiquait la ministre, Najat Vallaud-Belkacem, de « s’attaquer aux inégalités d’habitude dès le plus jeune âge », ce qui pourrait se formuler également de la manière suivante : s’attaquer aux stéréotypes de sexe qui légitiment les assignations qui nous sont dévolues et qui légitiment les rôles de sexe en les « naturalisant » c’est-à-dire en faisant paraître comme biologiques et naturels, des rôles de sexe différents et hiérarchisés, assignés aux filles et aux garçons :
« Les femmes doivent… »
« Les hommes doivent… »
Et qui légitiment aussi a priori les incompétences :
« Les femmes ne peuvent pas… »
« Les hommes ne peuvent pas…»
Ces stéréotypes sont donc l’un des maillons d’un système qui est structurellement inégalitaire ; ils sont des agents de hiérarchie entre les femmes et les hommes qui outillent les discriminations.
Deux chercheurs, l’une neurobiologiste, Catherine VIDAL, l’autre philosophe, Jean-Michel BESNIER, poseront en ouverture le cadre de notre réflexion et de nos débats.
Ensuite, nous aborderons des bastions dans lesquels les stéréotypes sont particulièrement nombreux et où la bagarre est encore rude, la culture et le sport.
Des expert-e-s, des chercheur-e-s, des artistes, des sportives apporteront leur contribution à nos échanges.
Vous avez dans votre dossier une courte biographie de tous les intervenants et de toutes les intervenantes.
INTERVENTION GENEVIÈVE COURAUD
Présidente d’Elu/es contre les Violences faites aux femmes
Mesdames, messieurs, et cher-e-s ami-e-s,
Tout d’abord un grand merci à Yvette et à Danielle pour les propos qu’elles viennent de tenir et qui nous remettent en mémoire le trajet dans lequel nous, militantes des droits des femmes, nous nous inscrivons et que nous nous garderons de perdre de vue, en particulier dans le contexte de ce jour où précisément nous perdons un Ministère des droits des femmes.
Merci aussi à Lady d’avoir ouvert grand le champ de notre réflexion et de nos débats en introduisant une perspective humaniste qui prend en compte l’autre et l’ailleurs.
« La vie des femmes est très inattendue » dis-tu, et je reprends à mon compte cette phrase qui me paraît très juste.
Merci à la Région Poitou-Charentes pour son indéfectible soutien, merci également à la ville de La Rochelle de nous recevoir une nouvelle fois dans cette salle à laquelle nous sommes attachées.
Voici la deuxième année que l’association ECVF, Elu/es contre les violences faites aux femmes, co-organise avec l’Assemblée des femmes, l’université d’été de La Rochelle.
C’était déjà le cas lors de celle de 2013, consacrée, dans la perspective des élections municipales d’avril 2014, à l’élaboration de programmes municipaux incluant en transversalité des objectifs d’égalité femmes/hommes. Thème qui incluait fortement la question de la prise en compte politique des violences faites aux femmes.
C’est donc à nouveau le cas cette année, avec un sujet qui, a priori, semble plus éloigné de l’objectif associatif d’ECVF.
Permettez-moi de prendre un peu de temps pour m’en expliquer.
ECVF a en effet une place un peu à part, par rapport aux autres associations féministes « généralistes » dirons-nous, et par rapport aux associations qui traitent des violences faites aux femmes ; elle réunit, rappelons-le, des élu-e-s de tous partis politiques démocratiques, appartenant à tous les niveaux de collectivités territoriales, engagé-e-s dans la lutte contre les violences faites aux femmes.
Faire prendre conscience aux élu-e-s de la proximité et de l’universalité du phénomène, de sa prépondérance, et de leur responsabilité d’élu-e-s dans l’exercice de leur mandat par rapport à ces violences et à leurs conséquences, tel était le dessein initial d’ECVF.
L’ambition qui était la nôtre au départ, de construire, par la formation des élu-e-s et des agent-e-s des collectivités territoriales, une culture commune et partagée s’est peu à peu, au fil des rencontres de terrain, des témoignages, des échanges avec les grandes associations dédiées, avec les professionnel-les et chercheur-e-s, avec les agents de nos collectivités, complétée d’un autre objectif: celui de peser pour que, lors des élections à venir, les programmes d’action politique insèrent cette question transversalement, parmi les autres actions en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes.
Nous sommes en outre nombreuses à ECVF à être également personnellement engagées au sein de l’association présidée par Danielle Bousquet, dont Yvette Roudy et Françoise Durand ont été les créatrices. Aussi ce compagnonnage de l’été n’est-il pas surprenant, même si les objectifs de nos deux associations ne sont pas identiques, l’objet d’ECVF s’inscrit pleinement, à notre avis, dans celui de l’ADF, en ce que la question des violences faites aux femmes participe d’un continuum qui lie toutes les questions des droits des femmes – et au 1er plan la parité dont l’ADF s’est faite la championne.
Vous me permettrez donc de saluer ici Francine Bavay présidente d’honneur et créatrice d’ECVF, Michèle Loup qui en a été également présidente, ainsi que les membres du bureau, Sylvie Deslandes, Marie-Noëlle Bas, Nora Husson, Christiane Kutten, Claire Donzel.
Je reconnais aussi Jo Mercier, élue de Lanton et Gaëlle Lenfant, élue de la région PACA. Et Danielle Bousquet, également membres du CA.
Fatima Lalem, vice-présidente, qui devait être présente parmi nous, retenue dans sa famille, m’a demandé de l’excuser, ainsi que Françoise Bachelier.
Que celles que je n’ai pas nommées m’en excusent.
L’objet de cette Université d’été – 2014 est de nous interroger sur les conditions qui permettent aux femmes de prendre en charge leur destin et leur vie, et d’avancer, malgré les préjugés et les stéréotypes dans lesquels on a pu les enfermer.
Ce sujet est au cœur même des convictions qui animent les membres d’ECVF. En effet, nous sommes convaincues que si les violences faites aux femmes doivent être prévenues, dénoncées et condamnées, si les victimes doivent être mises à l’abri et sauvées de leurs bourreaux, si leurs enfants doivent également être protégés, la nécessité qui suit ce premier temps est de rétablir ces femmes dans l’intégrité de leurs capacités et de leur confiance en elles. Nous ne croyons pas qu’il y ait un destin de victime, que les victimes soient écrasées à vie par les souffrances quelles ont endurées, que leur cerveau, ainsi que peuvent le croire certains, porte la marque indélébile de leur calvaire. Et à ce sujet, nous sommes extrêmement attentives à la contribution de la 1ère table ronde et aux travaux que présentera Catherine Vidal. En revanche, nous pensons qu’il peut y avoir des pratiques qui les enferment dans ce rôle de victimes, et que la marge de manœuvre entre l’aide, le soutien, la compassion et l’enfermement est étroite.
Nous pensons qu’il faut privilégier absolument toutes les démarches de thérapie, d’aide psychologique et de soutien social qui permettent aux femmes de trouver en elles-mêmes les ressources qui leur permettent d’être debout, de rester debout, et de prendre en mains leur avenir et celui de leurs enfants.
Nous pensons que tout doit être mis en œuvre pour aider les victimes à retrouver leur capacité d’empowerment « d’autonomisation » et cela ne peut se faire que grâce à des pratiques de confiance réciproque et non de prise de pouvoir, dans les capacités des uns et des autres qui lient les aidants et les victimes.
On voit donc combien le sujet de cette Université d’été au titre sans équivoque « Femmes debout : elles pensent, elles bougent, elles créent et se moquent des idées reçues ! » convient à notre engagement collectif.
Oui, Yvette, la parité a progressé.
Un regard rétrospectif rapide permet de constater les progrès engrangés depuis 2012, la création d’un ministère dédié aux droits des femmes, des lois et des dispositifs pertinents et efficaces. En cela, nous nous réjouissons de la place prise en politique par les femmes, et continuons de penser que la parité y est pour beaucoup.
Néanmoins, ayant personnellement beaucoup travaillé sur ce sujet et dans cet objectif, ayant consacré pratiquement 4 ans à ce combat en interne de mon parti, je vais m’autoriser à tempérer cette satisfaction et à vous confier qu’il peut m’arriver d’être vraiment déçue par le manque de solidarité et de conviction féministe des élues, par la pusillanimité de femmes pour l’élection desquelles nous avons tellement travaillé en amont de leurs mandats. Je les engage à être plus courageuses et volontaristes. Nous l’avons bien été nous-mêmes, et dieu sait ce que nous avons pu entendre ! Les quolibets que nous avons pu essuyer, les retours de bâton que nous avons pris, les évictions dont nous avons été victimes, les « Et puis pas celle-là » dont nous avons été stigmatisées.
Je souhaiterais à présent parler de la loi du 4 août, et je m’associerai à la satisfaction déjà exprimée de la voir votée malgré les menaces qui ont un temps pesé sur elle (en particulier concernant l’avortement et la disparition de la clause de détresse).
Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée Nationale, qui nous a fait l’amitié et l’honneur d’intervenir ici, a évoquer mieux que moi les conditions du travail de nos parlementaires
Précisons les points de satisfaction, et les interrogations qui sont celles d’ECVF.
Sur la question des violences, nous avons noté la volonté du législateur concernant la médiation pénale qui ne pourra être mise en place qu’à la demande de la victime, la prise en compte des enfants qui pourront bénéficier de l’ordonnance de protection, ainsi que le traitement de l’exercice de la responsabilité parentale dans le cas d’un conjoint violent, la transmission de l’ordonnance de protection par le/la juge au /à la procureur-e, les dispositions concernant le domicile – y compris l’autorisation pour la victime de dissimuler son adresse – enfin la généralisation du téléphone de grand danger pour les victimes de violences conjugales et de viol, pour n’en citer queles plus importantes.
Nous avons également noté l’obligation que fait désormais la loi (dans son Titre V, chapitre 2, article 61) aux responsables de collectivités territoriales, maires des communes de plus de 20.000 habitants, présidents d’EPCI, de Conseils Généraux et Régionaux de présenter, avant le débat sur le budget, un « rapport de situation en matière d‘égalité intéressant le fonctionnement de la (collectivité), les politiques qu’elle mène sur son territoire et les orientations et programmes de nature à améliorer cette situation ».
Pour ces raisons, jugeons-nous, cette loi qui encadre désormais en transversalité la question de l’égalité entre les femmes et les hommes est une étape importante de la marche en avant de notre pays dans ce domaine.
Cependant, tout en notant avec satisfaction le travail législatif et l’écoute dont ont fait preuve la ministre des droits des femmes et les parlementaires, ECVF considère que l’on doit rester vigilants sur la mise en application de ces dispositifs, en particulier sur le respect de l’égalité territoriale dans leur mise en œuvre et sur les moyens accordés aux associations dédiées, tant par l’état que par les collectivités territoriales.
Ajoutons que nous regrettons de n’avoir pas été entendues sur la grave question des élus condamnés pour harcèlement sexuel ou violences sexuelles, et qui continuent d’exercer leur mandat.
Pour terminer, je voudrais évoquer un point qui me paraît important, c’est celui de la prise en compte des violences dans les médias et dans l’opinion publique, qui ne sont que le reflet de ce que nous sommes, de ce qu’est la société, dans sa permanente mutation.
Les choses et les mentalités changent, certes. Il est loin le temps où- c’était avant la parité- jeunes (ou plus jeunes) élues nous entendions autour de la table du conseil municipal à propos d’un meurtre perpétré par un mari sur sa compagne dans notre commune : « C’est privé. Cela ne nous regarde pas !» Aujourd’hui tous les élus savent que ces violences regardent les maires et les élus au premier chef, et que l’action politique doit les prendre en compte et anticiper.
On a l’impression de progresser, ce qui est sans doute vrai, mais progressons-nous en vérité tant que cela ?
Je livrerai à votre sagacité et à votre analyse le témoignage suivant, celui d’une journaliste algérienne, spécialiste des droits des femmes et de l’égalité, qui évoquait sa carrière professionnelle et les freins qui ont été opposés à la publication de certains de ses articles.
Elle expliquait ainsi qu’elle pouvait proposer à la publication n’importe quel article sur les violences sexuelles et sexistes, sur le viol. Ces articles, naguère interdits, entraînent aujourd’hui une forte compassion du public et une mobilisation générale contre les auteurs, ils sont de ce fait bien reçus par les directeurs de publication.
En revanche elle avait effectué une enquête sur les femmes affectées d’un cancer du sein, qui l’avait conduite à interroger ces femmes à l’hôpital ; en grand nombre, avait-elle constaté, ces femmes avaient été abandonnées par leur famille et leur mari, lequel se remariait.
L’article relatant cette enquête sur le sort de ces femmes doublement victimes, de maladie et d’abandon avait été refusé parce qu’il touchait à « l’intime », au « privé », à des domaines sur lesquels il valait mieux garder le silence.
Pour quelle autre raison que le consensus masculin toujours bien présent de tolérance sur ce type de comportements.
Bien sûr, ce n’est pas en France, bien sûr… Ne sommes-nous pas nous-mêmes cependant en situation ici aussi de tolérer ainsi des violences extrêmes ?
FRANCOISE DURAND
Vice-présidente de l’Assemblée des Femmes
« Olympe de Gouges aujourd’hui »
L’an dernier, lors de l’université d’été 2013 au nom de l’Assemblée des Femmes j’ai demandé l’entrée d’Olympe de Gouges au Panthéon.
D’autres associations l’ont demandé comme nous, et lors de la consultation en ligne organisée par le Président des monuments historiques, Olympe de Gouges est arrivée en tête.
Mais les choix ont été autres, et nous saluons vraiment le geste du Président de la République qui a fait entrer au Panthéon quatre résistants de la seconde guerre mondiale deux femmes et deux hommes. Germaine Tillon, Geneviève Antonioz De Gaulle, Pierre Brossolette et Jean Zay.
Mais après cette entrée dite paritaire, nous déplorons le décalage important qui subsiste entre le nombre de femmes et d’hommes au Panthéon 72 hommes et seulement 4 femmes.
Ce décalage historique n’est pas sans avoir une incidence négative sur les luttes actuelles des femmes.
C’est pourquoi nous demandons une reconnaissance nationale d’Olympe de Gouges, car elle fut la première à vouloir inscrire dans la loi les droits des femmes par son immortelle Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Olympe doit entrer à l’Assemblée nationale, symboliquement bien sûr, soit sous la forme d’une statue soit sous celle d’une sculpture. Son dernier message en montant sur l’échafaud fut : « Enfants de la patrie, vous me vengerez »
Comme j’ai déjà évoqué l’an dernier l’œuvre d’Olympe de Gouges, je ne rappellerai aujourd’hui que quelques faits marquants.
Veuve à 20 ans, Olympe veut vivre, aimer et innover, elle monte à paris grâce à sa sœur qui y était déjà établie. Elle est vite gagnée par les idéaux de la Révolution dont elle veut que les femmes bénéficient.
Mais mis à part Condorcet, Sébastien Mercier et quelques autres, les hommes de 1789 ne partagent pas cette opinion et même s’y opposent.
Il faut savoir qu’à l’époque pour les femmes, s’occuper de politique relève de l’immoralité, de la folie voire de l’hystérie.
Dans un tel contexte, la première audace d’Olympe fut d’écrire ce texte féministe, visionnaire et moderne qu’est la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne suivie du contrat social femme-homme.
I’idée-force de cette déclaration est l’égalité entre les sexes et l’universalité des droits.
Pour Olympe, ce principe d’égalité trouve son origine dans les lois de la nature et de la raison.
Au cours des 17 articles que comportent la déclaration, elle se prononce pour l’égalité dans tous les domaines : politique, civil, pénal, fiscal et administratif.
Théoricienne radicale, pour Olympe, la différence ne vaut que dans l’égalité.
Si la Déclaration des droits de la femme peut sembler être une reprise de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, les quelques modifications qu’elle y apporte la rendent irréductiblement différente.
A l’époque, en l’absence d’état civil, le mariage était un sacrement indissoluble.
Olympe de Gouges propose un contrat juridique d’union conjugale, plus souple, fondé sur le désir masculin ou féminin, contrairement au 18ème siècle qui faisait du désir un privilège de la masculinité.
Les femmes peuvent connaître plusieurs amours au cours de leur vie et Olympe est favorable au divorce.
Elle est pour la reconnaissance des enfants illégitimes.
Souvent les femmes mourraient pendant les accouchements ; Olympe préconise l’hygiène et des établissements qui préfigurent les maternités.
Mais son œuvre politique et littéraire novatrice ne se borne pas aux femmes, elle embrasse toutes les injustices.
Elle lance des projets avant gardistes que la République ne réalisera souvent qu’un ou deux siècles plus tard.
D’abord la lutte contre l’esclavage, elle écrit une pièce « Zamor et Mirza » qui sera représentée quelques années plus tard sous le titre « l’esclavage des noirs » et sera jouée à la Comédie française malgré les réticences des comédiens qui ne veulent pas parler créole ou s’enduire le visage de réglisse.
Mais l’opposition vient surtout du lobby de la colonisation des planteurs de cannes à sucre qui transforment les représentations en vraies batailles rangées.
La pièce sera interdite au bout de trois représentations.
L’esclavage ne sera définitivement aboli qu’en 1848 et 150 ans plus tard, en 1998, la République reconnaîtra avec Christiane Taubira que l’esclavage est un crime contre l’humanité.
Olympe écrira une trentaine de pièces de théâtre sur des sujets d’une actualité brûlante, des manifestes et des brochures.
Elle préconise des reformes, sociales mais aussi dans beaucoup d’autres domaines. Elle propose une caisse patriotique pour les chômeurs, les personnes âgées et les enfants issues de familles démunies.
Elle est favorable à un impôt sur le luxe et elle est aussi pour des tribunaux populaires, préfiguration des jurys d’aujourd’hui.
Avec audace, elle ouvre sans cesse des voies nouvelles lorsque la France est assaillie par les armées monarchistes européennes, que la Vendée est à feu et à sang et que le Comité de Salut Public est de plus en plus centralisé, elle demande à la Convention d’organiser une consultation du peuple pour trouver le régime démocratique le mieux adapté. Cette prise de position lui a été fatale.
En fait, la vraie raison de sa mort est dans l’aveu du procureur de Paris qui la rend coupable d’avoir institué des sociétés de femmes, d’avoir délaissé les soins du ménage pour se mêler de la République.
Elle fut guillotinée le 3 novembre 1793.
A l’Assemblée des Femmes nous avons décidé de ne pas abandonner notre action pour la reconnaissance nationale d’Olympe de Gouges.
Comme je le disais à l’instant cette démarche, nécessaire pour nos combats actuels, n’est pas nouvelle pour l’assemblée des femmes. Dès sa création l’un de ses premiers actes a été d’accrocher une gerbe pour Olympe de Gouges aux grilles du Panthéon il y a plus de 20 ans maintenant.
Pour ma part au moment du bicentenaire de la Révolution, j’ai recherché dans les cimetières de la Révolution les lieux où elle pouvait être ensevelie pour l’honorer.
Comme l’assemblée des femmes est présente sur de multiples fronts à la fois, il nous a semblé utile de créer une association ciblée, dédiée à la reconnaissance de l’œuvre et de l’action d’Olympe de Gouges.
Cette association existe elle s’appelle « Olympe de Gouges aujourd’hui ».
Ses statuts sont déposés, c’est une association loi 1901.
Elle a pour particularité d’avoir un comité consultatif qui est en train de se constituer avec des personnalités politiques, du monde scientifique, littéraire et artistique.
Yvette Roudy et Danièle Bousquet en sont les premières membres.
Avec des féministes venues d’horizon divers, Geneviève Couraud et moi-même sommes fondatrices de cette association.
Cette association a pour objet la reconnaissance nationale d’Olympe de Gouges. Nous voulons une statue ou une sculpture pour elle à l’Assemblée nationale.
Nous demandons l’édition complète de ses œuvres, son entrée dans tous les programmes de l’Education nationale.
Nous soutenons les conférences, les pièces de théâtre, les films la concernant.
Nous proposons une veillée au flambeau tous les 3 novembre au Panthéon, date anniversaire de sa mort car nous ne renonçons pas à une entrée ultérieure.
Si vous le souhaitez, vous pouvez trouver des bulletins d’adhésion à l’association « Olympe de Gouges aujourd’hui » qui se trouvent sur une table à l’accueil.
La cotisation est fixée à 15 euros.
Vous serez les bienvenues à « Olympe de Gouges aujourd’hui » et nombreuses et nombreux je l’espère.
Je terminerai mon propos par cette exhortation d’Olympe : « Femme réveille toi. Femmes, quelles que soient les barrières qu’on vous oppose, il est en votre pouvoir de vous en affranchir, vous n’avez qu’à le vouloir. »
JEAN-MICHEL BESNIER
Université Paris-Sorbonne
« Les technologies suppriment-elles les genres ainsi que la reproduction sexuée ? »
La question peut étonner, mais de moins en moins. Pourquoi ? Parce qu’on commence à accepter l’idée selon laquelle les technologies ne produisent pas seulement des outils destinés à nous aider à bien vivre, mais qu’elles sont aussi des instruments qui nous transforment et nous conduisent à voir le monde différemment. Je fais partie de ces gens qui se demandent jusqu’où on peut se laisser porter par elles, jusqu’où on est prêt à leur laisser l’initiative. Disant cela, je ne suis pas en train de mythifier les technologies en leur prêtant un pouvoir destructeur. Je suggère simplement qu’elles ont acquis une espèce d’autonomie – une faculté de s’auto-développer – sans que nous sachions vraiment comment l’arrêter.
Il faut à présent s’entendre sur le sens de cette question : « les technologies suppriment-elles les genres ainsi que la reproduction sexuée ?
Donna Haraway, dans son Manifeste Cyborg, avait donné le ton : les technologies appliquées au vivant et axées sur l’hybridation du naturel et de l’artificiel, devraient nous permettre d’en finir avec les oppositions dans lesquelles nous nous enfermons depuis toujours. Des courants féministes, parfois éclairés par la pensée de Derrida et sa critique des dualismes métaphysiques (au nombre desquelles la différence sexuelle), se sont engouffrés dans la brèche : la cyborgisation du vivant serait la voie de l’émancipation puisqu’elle ferait disparaître la barrière des genres et contribuerait à l’avènement d’une post-humanité, unifiée sous le signe du neutre. Ce neutre – ce « ni l’un ni l’autre » – avait été baptisé, dans les années 1960, l’unidimensionnel et Marcuse y voyait le comble de l’aliénation. On voit donc que si les technologies poursuivent le neutre, elles sont suspectes d’attenter à la liberté qu’entretient toujours le conflit entre les extrêmes.
L’annonce récente des progrès de l’expérimentation en matière d’utérus artificiel a réactivé la problématique de la suppression des genres que les biotechnologies s’efforceraient d’obtenir. L’ectogenèse appartenait à la contre-utopie du Meilleur des Mondes. Elle est désormais utilisée chez les brebis et sera opérationnelle chez les humains dans quelques décennies Henri Atlan parlait de 2030).
La conviction trouve donc à s’installer : nous développons des technologies qui doivent nous permettre d’en finir avec les catégories binaires dans lesquelles nous enfermons la réalité depuis l’aube de l’intelligence humaine. Elles vont contribuer à rendre caduque l’anthropologie structurale, le système de classification universelle que décrivait Lévi-Strauss. L’intérêt philosophique des technologies tient pour l’essentiel à ce qu’elles relaient les critiques intentées à la métaphysique issue de Platon qui n’a jamais su dépasser les oppositions matricielles censées permettre de déchiffrer la réalité (la matière et la forme, la substance et le phénomène, l’âme et le corps, l’être et le devenir…). On redécouvre ces temps-ci le dernier en date des philosophes convaincus que les technologies constituent le moyen d’éviter les impasses de la métaphysique empêtrée depuis toujours dans les dualismes : Gilbert Simondon critique du hylémorphisme d’Aristote qui nous a toujours empêcher de comprendre le mécanisme de l’individuation qui caractérise le vivant (c’est-à-dire le processus par lequel se constitue un organisme qu’on ne saurait réduire à un simple composé de matière et de forme).
L’explicitation du second aspect de la question se situera dans la lignée de ce constat général : les biotechnologies s’obstinent à supprimer la reproduction sexuée, en cherchant à remplacer la naissance du vivant par sa fabrication programmée. Les courants transhumanistes ont désinhibé le préjugé selon lequel la naissance, parce qu’elle est hasardeuse, trahit une faiblesse de l’humain qu’il faudrait surmonter. Vous vous souvenez sans doute du film Bienvenue à Gattaca. Si la technologie doit nous rendre parfaits, elle doit supprimer cette part hasardeuse représentée par la rencontre aléatoire de deux gamètes d’où naît l’enfant.
Le clonage a beau être proscrit et incriminé au titre de crime contre l’espèce humaine, il intimide de moins en moins ceux qui n’hésitent plus à annoncer qu’ils militent justement pour un au-delà de l’humain : obtenir de fabriquer la vie, notamment en recourant à la duplication de génomes sélectionnés après décryptage, voilà qui est réputé accomplir l’idéal eugéniste qui n’ose pas encore s’avouer comme tel mais qui hante les technologies procréatives. Déjà, on n’hésite plus à expliquer que la reproduction sexuée est un moyen sélectif qui a permis à la plupart des espèces animales de survivre mais qui leur a aussi imposé de mourir. La sexualité va naturellement de pair avec la mort. Jacques Ruffié le rappelait dans son livre Le sexe et la mort : la sélection naturelle a choisi la sexualité pour les organismes complexes qui doivent intégrer de la diversité pour pouvoir s’adapter et se renouveler. « Nous sommes les enfants du sexe et de la mort », écrit-il (p.11). Et la mort présente du point de vue de la sélection naturelle un avantage : « la reproduction sexuée crée sans cesse de nouveaux types à patrimoine génétique original, mais ceux-ci ne peuvent diffuser leurs combinaisons (et en particulier les mieux adaptées) que si les anciens leur laissent la place, qu’eux-mêmes abandonneront un jour à leurs descendants » (p.21). Les organismes élémentaires qui se reproduisent par scissiparité sont à peu près immortels. Ils se reproduisent par division et régénération à partir d’une fraction d’eux-mêmes. Tant que les conditions du milieu sont stables, ils sont immortels. Mais étant incapables de changer, ils sont privés du progrès évolutif qui nous a permis, à nous, de voir le jour et de prospérer.
On pourrait rêver que l’humain fonctionne sur le modèle du protozoaire ou, plus simplement si j’ose dire, qu’il ne soit composé que de cellules capables de se dupliquer indéfiniment à l’identique, au lieu d’être soumises à une hybridation qui les conduit à varier, à muter et à s’exténuer. Mais du point de vue de l’évolution, les individus que nous sommes comptent pour à peu près rien. Le biologiste Richard Dawkins nous a désabusés depuis un certain temps, en nous révélant que nos organismes ne sont rien d’autres que des containers à gènes désireux égoïstement d’être optimisés et de se transmettre.
Les transhumanistes se sont emparés des découvertes concernant les cellules souches totipotentes induites afin d’alimenter leur fantasme d’immortalité : supposons que nous puissions ramener nos cellules somatiques à la condition des cellules germinales dont elles sont issues, non seulement nous pourrions envisager la production continuée de nos organes pour remplacer ceux qui auraient fait leur temps, mais nous pourrions aussi imaginer de bloquer le vieillissement de nos cellules, en neutralisant le mécanisme de la télomérase responsable de la dégénérescence cellulaire. L’obsession de la longévité, voire le fantasme de l’immortalité, sont en tous les cas défavorables à la cause de la reproduction sexuée qui a besoin de la diversification et non de la duplication, qui a besoin par conséquent du renouvellement et de la mort pour assurer la vie. Mais les transhumanistes qui rêvent d’immortalité n’aiment pas la vie et peuvent bien se passer du risque inhérent à la reproduction sexuée. Cela ne signifie pas qu’ils envisageraient forcément de se priver de la sexualité, mais ils la réduiraient volontiers aux automatismes de la pornographie, comme le suggèrent certaines pages de Houellebecque. A sa façon, la pornographie symboliserait la compulsion de répétition d’où surgit la petite mort (l’orgasme) censée éviter la grande !
J’ai à présent expliqué le sens de la question que j’ai accepté d’examiner. Je voudrais à présent aller plus loin et interroger les raisons qui justifient que les technologies que nous développons aujourd’hui paraissent attenter à l’idée de l’humanité que la culture occidentale a d’abord privilégiée. Cette idée de l’humanité fondée sur la sexualité et la mort n’est pas pour rien associée dans La Genèse au péché originel. De là à ce que les technologies ambitionnent de nous en débarrasser, il n’y a qu’un pas que franchissent certains en reliant le transhumanisme à la gnose des anciens…
Avec un minimum de sens de la perspective historique, on ne devrait pas s’étonner que les technologies puissent prétendre modifier la représentation que l’humain se faisait de lui-même et les conditions matérielles de son existence. Elles se sont développées pour cela même : elles devaient produire des outils fonctionnant à titre de prothèses destinées à prolonger notre corps aux prises avec son environnement ; elles étaient donc d’emblée un facteur de survie et d’augmentation de la puissance d’agir ; qu’elles soient devenues l’agent de la transformation même de l’humain est dans la logique de leur genèse ; ce qui nous interroge et nous effraie quelquefois, c’est de réaliser que nous devenons incapables de les contenir et qu’elles ont débordé les apprentis-sorcier que nous sommes. Ce diagnostic est banal et il nous étonne seulement quand nous anticipons des aspects de la transformation de l’humain en cours qui nous apparaissent comme des ruptures. La rupture serait ici la disparition de l’opposition des genres ou de la reproduction sexuée qui touche à la fois au préjugé social et à la conviction naturaliste (les femmes seraient inférieures par nature aux hommes), préjugé et conviction qui sont des valeurs discutables en tant que telles, mais encore perçues comme structurantes par la plupart des sociétés.
Depuis le début des temps modernes, la science et la technique ont mis l’intelligence humaine au service de l’accomplissement de l’humanité. Nous étions des êtres inachevés, des prématurés. Nous allions devenir des êtres comblés, à peu près à l’égal des dieux. Souvenez-vous des propos emphatiques de Condorcet.
La finitude humaine justifiait que nous soyons non seulement des êtres de besoin (comme les animaux) mais aussi des êtres de désir (des êtres habités d’un idéal de perfection), des êtres de communication (des êtres attirés par l’autre), des êtres exposés au conflit, des êtres résolus à la mort comme à leur destin… Cette représentation de l’humain a prévalu, y compris dans le contexte euphorique des Lumières qui pouvaient annoncer le bonheur grâce aux savoirs scientifiques et techniques.
Depuis le début du millénaire et après les traumatismes du 20è siècle, l’euphorie atteint son comble : les technologies vont permettre une longévité indéfinie, vont imposer une pacification à l’échelle de la planète, vont faire disparaître les conflits grâce à la mise en transparence des communications, vont éliminer les ambiguïtés et les violences grâce à une clarification des langages sinon à la mise en œuvre de relations télépathiques (la communication de cerveau à cerveau). Je cite là quelques unes des promesses contenues dans le Rapport sur la convergence technologiques pour l’augmentation des performances humaines (autrement nommé Rapport NBICs de 2003). Bref, les technologies sont en passe de nous débarrasser de cette finitude sur laquelle reposait tout ce que nous tenions pour essentiel : l’art, la religion, la politique – l’univers symbolique des cultures et des sagesses. C’est cela qui bouleverse nos convictions et nos idéaux. C’est cela qui justifie l’audience croissante des technoprophètes et l’accent apocalyptique de ceux qui célèbrent la révolution technologique.
La question : « les technologies suppriment-elles les genres ainsi que la reproduction sexuée ? », sans que je prétende la minorer, n’est qu’un symptôme partiel, comme tout symptôme, d’une situation plus générale et préoccupante : celle qui nous conduit à accepter de plus en plus d’être réduits à accepter les automatismes imposés par nos technologies (la simplification et l’élémentarisation) et à refouler toutes les ambigüités dont notre langage et notre vie symbolique sont porteus. Rêver que les technologies fassent triompher le neutre pour échapper à l’opposition des genres ou qu’elles autorisent une procréation dépourvue de hasard – et pour ce faire, exempte de reproduction sexuée -, c’est là une aberration de plus en plus répandue dans l’opinion publique de nos jours. Y-a-t-il un moyen de s’opposer aux fantasmes générés par les innovations technoscientifiques ? C’est là une vraie question dont celle des préjugés qui empoisonnent notre existence quotidienne n’est souvent que la face visible.
MARINE BREGEON
mon métier : soudeuse
Comment est venue cette idée ? C’est un peu vague. A vrai dire c’est un hasard complet.
Quand j’ai décidé de partir dans cette voie, je venais de perdre mon père d’un cancer. A ce moment-là, c’était difficile notamment au niveau scolaire car j’avais arrêté mon bac, n’avais pas repris de formation et n’étais pas bien du tout dans ma tête.
Etant l’ainée de 4 enfants je devais me prendre en main. J’ai d’abord cherché dans la photographie, on m’avait proposé un apprentissage, mais on m’a lâchée au dernier moment. J’ai voulu me diriger vers le bâtiment, on m’a vite découragée.
J’étais comme beaucoup d’adolescents aujourd’hui, complètement perdue de ne pas savoir quoi faire. J’ai donc décidé de suivre les pas de mon père qui, à mon âge, était soudeur aussi dans l’entreprise de son propre père.
Là encore, on a très rapidement tenté de me décourager, que ce soit ma famille ou mes amis. Je n’ai pas laissé tomber cette fois. Ma maman et un ami de mon père m’ont soutenue. J’ai donc trouvé une école pour mon apprentissage en mention complémentaire soudage et une entreprise.
J’avoue que les débuts n’ont pas été faciles mais j’ai eu la chance d’avoir un prof qui m’a « sortie de mon trou », si je peux me permettre. Mais je savais aussi que je n’avais pas le choix et qu’avec de la volonté j’y arriverai.
J’ai également eu beaucoup de chance d’avoir participé aux Olympiades des métiers. Sans ça, je pense que je n’aurais pas continué. En étant une femme dans ce domaine, ça reste assez compliqué pour trouver du travail vraiment intéressant, surtout lorsqu’on a peu d’expérience. Les Olympiades m’ont vraiment poussée très haut. Formatrice au bout de 2 ans de soudure c’est plutôt pas mal. J’ai quitté ce métier parce que j’estimais que je ne m’étais pas assez « sali les mains » pour former au meilleur point mes stagiaires.
J’ai donc trouvé un poste à DCNS dans la fabrication de sous-marins, en tant que soudeuse coque. Là, j’ai vraiment appris ce qu’est le métier de soudeur. Physiquement, ça n’a pas été facile mais c’est possible (pas sur du long terme par contre). Mes collègues étaient vraiment sympas, il y avait une très bonne ambiance et je pouvais compter sur eux. Mais je tenais particulièrement à ce qu’on ne fasse pas de différence au niveau du travail en lui-même du fait que je sois une femme.
J’ai quitté DCNS en mai 2014. Le besoin de voyage ma rattrapée et j’en avais besoin. Cette idée me trottait dans la tête depuis un bon moment et comme on n’a qu’une seule vie et que l’on ne sait pas de quoi est fait demain, je suis partie! Je suis donc actuellement en Nouvelle-Zélande où j’ai trouvé du travail dans la soudure. J’apprends encore beaucoup. Ce qui est génial dans ce métier, c’est qu’il y a énormément de choses à apprendre! Et pour moi, associer le voyage avec le travail est une très grande richesse, que ce soit moralement et techniquement. J’en ressors grandie à chaque fois. J’ai rejoint des amis et je partage cette expérience avec eux.
J’avais peur d’avoir du mal à trouver du travail ici, car encore une fois, on n’aime pas beaucoup les filles dans ce genre de métier. Les personnes des agences d’intérim me l’ont elles-mêmes dit. Mais cette fois ci, mon expérience a joué en ma faveur. Tout est possible, il suffit de ne pas se laisser marcher sur les pieds et évidement de connaître son métier. Le mien en est devenu une passion !
CLAIRE DONZEL
Trésorière de l’Assemblée des Femmes
Présentation de la Table ronde Sport
Trois intervenantes pour cette table ronde, pour dire les « sportives debout », vent debout, si j’ose dire, si Sarah m’y autorise.
Il y aura celle qui DIT, qui a légitimité à le faire, depuis son statut et son expertise de chercheure en sociologie du sport. C’est Catherine LOUVEAU. Je me permets un aparté : à l’Université aussi, semble-t-il, il lui a fallu, lui faut être une « femme debout » . Elle a l’élégance de travailler, de se pencher sur le sort des autres, celles qui baignent dans le monde sportif, mais elle pourrait aussi causer de ce qui se vit à l’Université !
Il y aura ensuite celle qui MET en ŒUVRE, en ACTION. Elle a été cycliste de Haut Niveau. Vous savez, en même temps que l' »autre » ! Mais elle, c’était vraiment avec son corps et sa tête qu’elle courait. Pas avec des produits, « bio », bien sûr. Elle se situe à la croisée, à l’interface avec ce vécu de femme sportive et nourrie par ce que Catherine et les autres révèlent et disent. Elle est Directrice Technique Adjointe de la fédération nationale de Hockey-sur-Glace, et simultanément Présidente de FEMIX´SPORTS. Marie-Françoise POTEREAU est donc celle qui agit, forte d’expertises croisées ; celle qui a en charge de mettre en place, faire bouger, voire bousculer.
Et puis, il y a aussi celle qui vit la chose en « femme debout », encore dedans. À elle, à Sarah STEYAERT, nous avons demandé de TÉMOIGNER ce que c’est qu’être une « sportive debout », sur le pont de son voilier mais aussi contre les vents et marées, peut-être. Elle nous dira.
Thèmes abordés lors du débat :
- sportives et féminisme / féminisme et sport
- L’abandon de la pratique sportive par les filles
- La violence réelle et symbolique dans le sport
- La pratique sportive et la prévention / le traitement des maladies cardio-vasculaires et du cancer
- La parité dans le monde sportif entre contrainte et volontarisme
- La tenue vestimentaire pour la pratique du sport, fonctionnelle et laïque
- La force morale née de la pratique sportive, réinvestissable dans la vie politique notamment
- Quid de la remise en cause par le monde sportif de ses pratiques ?
- L’apprentissage précoce d’une motricité universelle, antidote aux stéréotypes
MARIE-FRANCOISE POTEREAU
Présidente de Femix’sports
COMMENTAIRES DIAPOS
DIAPO 2
Bonjour,
Marie-Françoise POTEREAU : je suis présidente de l’association nationale « Femmes Mixité Sports », seul réseau « femme et sport » existant au niveau national, créé en 1999 suite aux assises femmes et sports initiées par Marie-Georges BUFFET.
Parallèlement, et ce depuis quelques mois, ma mission s’est renforcée en étant nommée « conseillère interfédérale » chargée de la féminisation des fédérations sportives auprès du Ministère des droits des femmes, de la Ville, de la jeunesse et des sports.
J’ai un parcours de sportive de haut niveau en cyclisme, je suis issue du corps des professeurs de sport, et j’ai fait essentiellement ma carrière en qualité de cadre technique (d’abord dans le cyclisme et aujourd’hui au sien de la FD de hockey sur glace.
Mon engagement pour la cause des femmes dans le sport et dans la société en général est sans doute dû à ce parcours réalisé dans cet environnement. Et nous savons combien le milieu sportif a d’abord été créé par les hommes et pour les hommes.
Se lancer dans un métier dit « masculin » m’a exposé à être considéré faire « un métier d’homme » et j’ai compris à ce moment qu’il fallait que je m’impose et que j’active à nouveau les valeurs qui m’avaient animée durant ma carrière sportive : détermination, engagement, dépassement de soi, émotions fortes, etc… Tout ce qui est traditionnellement réservé aux hommes !!
Faire sa place dans cet univers déclenche beaucoup de pression sur soi et cette lutte contre les stéréotypes peuvent peser lourdement sur votre posture au sein d’une équipe ou d’un groupe, et il faut s’affirmer, et il faut, demain, que chaque femme ait le pouvoir de le faire et ne doit pas se résumer à un combat personnel comme beaucoup d’entre nous l’ont fait pour arriver jusqu’à là.
Si cette pression a pesé sur moi à un certain moment, aujourd’hui, je l’ai dépassée, voir je l’ai maîtrisée en osant m’engager, en faisant autrement, étant convaincue que tout est possible !!
DIAPO 3
LE SPORT N’EST PAS EN DEHORS DE LA SOCIETE, il est à son IMAGE !!
Débattre de sujets majeurs pour faire évoluer la condition féminine dans le sport, promouvoir l’équité entre les sexes, encourager, accompagner les femmes aux postes à responsabilités telles sont les missions que FEMIXSPORTS c’est donnée comme feuille de route, en appui des institutionnels et en répondant, Madame La Présidente de l’Assemblée des Femmes, à votre invitation pour partager les idées, les engagements et avancer toutes et tous ensemble !!
Je suis convaincue que nous sommes en train d’inventer ou de construire LE MODELE DE DEMAIN
« CELUI DE L’EQUILIBRE FEMME/HOMME DANS LE SPORT »
DIAPO 4
Pour reprendre le jargon cycliste, celui de mon sport, expression également utilisé par le Haut Conseil à l’Egalité, je dirai que nous étions actuellement sur le grand braquet !!
Et nous pour rouler vite il faut avoir le vent favorable !!!
Aujourd’hui, et si nous voulons garder cette vitesse lutter j’en suis sûre CONTRE LE VENT.
Mais Les avions décollent face au vent !!!
Le principe de l’égalité entre homme et femme avait déjà questionné nos instances internationales notamment le CIO avec la modification de la charte olympique en 1996 « soutenir et encourager la promotion des femmes dans le sport à tous les niveaux et dans toutes les structures….. »
Au niveau national si on repart du rapport DEYDIER, nous constatons que des initiatives se sont succédées pour créer des leviers favorisant l’égalité et ainsi lutter contre les inégalités de genre.
La nomination en 2012 d’un gouvernement paritaire de l’histoire de la république et le rétablissement du Ministère des droits des femmes ont permis d’engager véritablement une politique de l’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport.ET a bousculé les fédérations avec l’exigence de présenter des plans de féminisation (79 FD à ce jour). Pour certaines FD c’est la révolution !!
DIAPO 5
PANORAMA DU SPORT FRANÇAIS :
Aujourd’hui c’est 5 463 236 femmes pratiquent une activité sportive soit 37 % de licenciées féminines
3 % seulement de licenciées féminines en ZUS
Lorsqu’on parle de haut niveau : 37,66% de sportives haut niveau
Aux J.O de Londres : les femmes représentaient 44 % de la délégation française et ont gagné 44 % de médailles.
Egalité à ce jour dans les disciplines.
En revanche, nous devons progressé davantage dans l’accès aux métiers d’entraîneurs, de cadres techniques, etc..
Nous avons étudié le fait de mettre en place une politique des viviers. Pourquoi
CTR 16 % CTN 21,5% EN 11,61 % DTN 7/58
SOIT un total de 16.92 %
Aujourd’hui encore rentrer dans une ETR c’est semblable à une femme qui rentre dans un algéco pour une réunion de chantier. On vous teste, on veut savoir si vous connaissez vos dossiers, intimidation, etc…
DIAPO 6
Un monde qui bouge !
Mesdames nous représentons aujourd’hui la moitié de l’humanité,
On vit dans un monde multidisciplinaire, changement des modes de vie, et donc changement des modes de pensée. L’alternative c’est les femmes !!!
Cette diapo est là pour pointer le retard du milieu sportif en comparaison aux autres environnements
Et démontrer que le changement intégré dans le sport
Le changement c’est penser autrement pour agir différemment !
Et La mixité pour nous est un levier, voir un atout. Nous ne ferons pas sans eux, mais avec eux ! Comme 2 mouvements d’une respiration, ils sont à la fois différents et de valeurs égales.
La performance qui anime le sport, se traduit également aujourd’hui dans tous les environnements (économique, politique, etc) Et les binômes femmes/hommes dans le monde de l’entreprise ont permis de démontrer….
Le mixité doit un atout pour le sport (complémentarité dans les compétences, dans les relations humaines). La veille permanente que nous réalisons permet de mettre en lumière les principaux freins
Notamment par la non maîtrise des processus des nominations dans les postes à responsabilité et la non maîtrise des codes dominants.
Et d’avoir ainsi l’ambition de passer de la prise de conscience à la mise en œuvre du changement !
DIAPO 7/8
Pour lutter contre le fameux e plafond de verre omniprésent dans l’univers du sport dès l’instant qu’il s’agit d’accéder aux postes à responsabilité nous avons établi avec le Ministère une feuille de route :
- Animation du réseau des femmes cadres techniques et entraîneurs ( pour cultiver l’ambition et donner confiance
- Former à la prise de responsabilité par un programme de formation « réussir au féminin » pour les femmes dirigeantes pour OSER S ENGAGER, OSER NOS DIFFERENCES
- 8 femmes présidentes de FD sur 😯 affiliées au CNOSF
- 1 seule femme sur les FD olympiques
Courrier de Denis MASSEGLIA en date du 25 juillet 2013 : sur le projet de loi sur la parité et l’impact sur le mouvement sportif
« pour féminiser nos instances, nous souhaitons que les dirigeants sportifs connaissent le fonctionnement associatif et il faut du temps ! »
- Accompagner les plans de féminisation des fédérations pour développer une prise en compte à tous les niveaux de la pratique féminine (de la pratique de masse non compétitive au haut niveau) 79 plans de féminisation dans les FD
Diapo 9
Nous avons entrepris des chantiers tels que celui de la médiatisation :
L’organisation des 24 H du sport féminin en février dernier en partenariat avec le CSA (7% de retransmission télévisée pour le sport féminin) trop peu
Une politique volontariste en novembre 2013 (V.FOURNEYRON) avec la mise en œuvre d’un dispositif de soutien pour la production audiovisuelle des évènements sportifs
Attribution d’un fond d’1 million d’euros pour les fédérations qui s’engageraient
La mise en place et le pilotage d’indicateurs de mixité constituent une première étape indispensable au changement. Taux d’attribution des postes hommes femmes sur des fonctions identiques,
Outil de diagnostic et pilotage des actions prioritaires
C’est l’application de la méthode « d’approche intégrée de l’égalité » dans laquelle s’inscrit l’action du Ministère des Sports dans la feuille de route émise après le conseil interministériel et qui permet de faire une veille permanente sur l’évolution, et prendre des décisions.
- Nous avons besoin d’être sensibilisé à la nécessité de réseau. La mise enplace du réseau féminin au sein de notre organisation FEMIXSPORTS doit nous permettre d’opérer cette sensibilisation, et d’accroître la visibilité des expériences réussies. Sources de motivation et de développement, ce doit être un moyen de maintenir les personnes, de les soutenir dans leurs projets, et ce doit être aussi la possibilité à certaines d’entre vous de vous identifier dans des rôles de modèle.
Les animations régionales qui s’opèrent depuis quelques mois sont le résultat de cette volonté de faire vivre un réseau des femmes cadres techniques, entraîneurs, conseillères d’animation. Véritable succès rencontré de ces journées de rencontre, d’écoute et de partage.
Mais il faut aussi accompagner les fédérations sur cette culture duchangement. Les pratiques ne pourront évoluer que si les gouvernances des fédérations et donc les présidents sont convaincus que la mixité est un gage de succès ! C’est une vraie révolution culturelle et il faut du temps.
Diapo 10
Je vous parlais des mouvements de respiration, inspiration pour créer le mouvement et donner l’impulsion à la recherche de l’équilibre permanent. Ces deux pôles constituent l’humanité, si l’un vient à manquer nous sommes en déséquilibre. Paradoxalement, il nous reste à le trouver, le développer dans le sport…. Soit à trouver le second souffle !!
Et puis il faut se battre pour l’égalité dans la différence !
Se réunir est un début ;
rester ensemble est un progrès ;
travailler ensemble est la réussite. »
Henry Ford
CLÔTURE DE L’ASSEMBLÉE DES FEMMES
INTERVENTION DE DANIELLE BOUSQUET, PRÉSIDENTE
à l’adresse de la MINISTRE DES DROITS DES FEMMES,
MARISOL TOURAINE
27 août 2014
Madame la Ministre,
L’Assemblée des Femmes est extrêmement honorée que votre première prise de parole officielle, en tant que Ministre qui avez dorénavant en responsabilité les droits des femmes, soit pour l’Assemblée des Femmes, créée en 1992 par Yvette ROUDY, 1ère Ministre des droits des Femmes et Françoise DURAND.
L’Assemblée des Femmes rassemble des femmes et des hommes de progrès, sur des valeurs de démocratie et de laïcité.
Vous n’êtes pas sans le savoir, Madame la Ministre, la disparition d’un ministère des droits des femmes de plein exercice, et le rattachement des droits des femmes au Ministère des affaires sociales et de la santé a créé un vif émoi dans le mouvement féministe et les associations, et a été vécu comme une régression.
La loi sur l’Egalité réelle vient d’être promulguée le 4 août, la proposition de loi sur la prostitution est en attente au Sénat, la culture de l’égalité entre les filles et les garçons à l’école et la lutte contre les stéréotypes est à reprendre, la lutte contre les inégalités accrues envers les femmes sur certains territoires est à initier, l’engagement international de la France en faveur des droits des femmes partout dans le monde – et du droit à l’avortement sécurisé en particulier – est à maintenir lors des grandes rencontres internationales telles Le Caire (1994) + 20, Pékin (1995) + 20 et les Objectifs du millénaire (2000) post 2015.
Madame la Ministre, les femmes sont dans l’attente, tous les acteurs et actrices de l’égalité entre les femmes et les hommes sont dans l’attente.
C’est pourquoi votre présence ici montre votre volonté d’affirmer votre engagement en faveur des droits des femmes, afin que cette question politique reste un des axes forts du gouvernement, comme c’est le cas depuis 2012.
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Vous n’êtes pas élu-e ? :
Merci de bien vouloir vous inscrire en ligne via ce formulaire ou de télécharger le bulletin d’inscription (bulletin_dinscription_2014.pdf) et de le renvoyer complété à cette adresse accompagné de votre règlement par chèque :
Claire DONZEL – 18 chemin des cloches – 74 940 ANNECY LE VIEUX
Vous êtes élue ? :
L’Université d’été est cette année co-organisée avec l’association ECVF – Elu/es Contre les Violences faites aux Femmes, organisme agréé de formation pour élus.Toutes et tous les élu/es sont invité/es à participer à l’Université d’été en s’inscrivant à la formation via ce formulaire. Vous recevrez alors un bulletin d’inscription à faire signer et tamponner par votre collectivité.
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